« La France a abandonné le Mali en plein vol », avait déclaré Choguel Kokalla Maïga, Premier ministre mi-politique, mi-poète, entièrement convaincu. Mais à ce jour, le mystère demeure : l’avion a-t-il continué à voler ? A-t-il trouvé une piste d’atterrissage ? Ou a-t-il juste pris feu quelque part entre les nuages du FMI et les orages de la CEDEAO ?
Rappelons les faits :
- 18 août 2020, coup d’État numéro… bon, on a arrêté de compter, mais celui-là a été signé par un certain capitaine Assimi Goïta. Résultat : fin du vol « IBK Airlines », dont les passagers réclamaient plus de cacahuètes et moins de turbulences électorales.
- 24 mai 2021, deuxième turbulence : le capitaine Assimi prend les commandes en mode « je vous avais prévenus, hein ». Coup de frein, changement d’équipage, Choguel Maïga monte à bord en tant que commandant de bord… ou du moins, chef de cabine très bavard.
- 2022, fin du partenariat Barkhane. Traduction : le copilote français, agacé par les turbulences géopolitiques, s’est éjecté de l’appareil en criant « Débrouillez-vous ! ». D’où la fameuse phrase de Choguel, entre deux rafales de discours : « La France nous a laissés en plein vol ! »
Mais venons-en à l’essentiel : qui pilote cet avion ?
Le général Goïta (autoproclamé pilote depuis l’altitude 2021) tient fermement le manche. D’ailleurs, dans le cockpit, on dit que c’est lui qui choisit la musique à bord : du Wagner en boucle (depuis que les Russes sont montés à bord, le catering a changé aussi : vodka tiède et discours anti-impérialistes au menu).
Quant à Choguel, il a passé quatre ans à naviguer entre les nuages noirs de la crise économique, les trous d’air de l’inflation, et les orages sociaux. On l’a parfois vu jeter des discours en parachute à l’arrière, espérant qu’au moins les passagers y trouvent du réconfort. Mais hélas, dans la classe économique (qui représente 98% des sièges), les passagers s’accrochent à leurs sachets de riz subventionné pendant que le kérosène de la transition commence à manquer sérieusement.
Le système de navigation ?
La boussole diplomatique penche dangereusement vers l’Est. Les anciens copilotes français ont été remplacés par des techniciens russes au look douteux, et le GPS constitutionnel n’a toujours pas été mis à jour. On cherche toujours la destination finale : élections démocratiques ? République populaire ? République bananière recyclée façon 2025 ?
Et les passagers ?
Eux, ils n’ont toujours pas vu le plateau-repas de la croissance. En zone rurale, on rame pour avoir une école ouverte, un centre de santé décent ou même juste une route sans nid-de-poule taille Airbus. En zone urbaine, on lutte avec le chômage, les délestages et les moustiques dopés au paludisme. Mais malgré tout, ils restent là, attachés à leur ceinture d’espoir, espérant que ce foutu vol finira par atterrir dans un Mali stable, libre et prospère (avec option wifi gratuit).
Oui, la France a sauté en plein vol. Mais personne n’a expliqué si elle était à bord par gentillesse, par intérêt, ou juste pour inspecter les bagages. Oui, Choguel a tenté de maintenir l’appareil en l’air… mais sans plan de vol, ni carburant, c’est dur.Et oui, Assimi est aux commandes… mais pour aller où ? Vers un miracle, une panne sèche, ou un crash maîtrisé à la guinéenne ?
En attendant, attachez vos ceintures, le vol ML2020-Transition continue. Prochaine escale : élections 2026, si l’appareil n’est pas détourné d’ici là par un nouveau comité de redressement patriotique.
Bon voyage, peuple malien. Et n’oubliez pas : en cas d’urgence, le gilet de sauvetage est sous votre siège. Si vous le trouvez.
Bouka Niare
Notre envoyé spécial au-dessus des nuages, entre le cockpit de Kati et la soute du FMI