Les écoles maliennes : usines à diplômes ou temples du savoir ?

Au Mali, la question de la qualité de l’éducation fait débat depuis plusieurs décennies. Si le pays a connu une explosion du nombre d’écoles et une démocratisation de l’accès à l’éducation, nombreux sont ceux qui dénoncent aujourd’hui un système devenu une « usine à diplômes » : des établissements qui délivrent des certificats à la chaîne, au détriment de la qualité de la formation et de l’employabilité des jeunes diplômés.

 

Explosion quantitative, stagnation qualitative

Depuis l’indépendance, le Mali a multiplié les réformes pour élargir l’accès à l’école. Le taux brut de scolarisation est passé de 20 % dans les années 1980 à près de 64,5 % en 2001/2002, avec une progression constante jusqu’à aujourd’hui. Pourtant, cette massification s’est faite sans les investissements nécessaires dans les infrastructures, les manuels et surtout la formation des enseignants. Résultat : des classes surchargées (parfois plus de 100 élèves), un manque criant de professeurs qualifiés et un déficit de manuels scolaires (un livre pour trois ou quatre élèves).

 

Des réformes sous tous les régimes, mais peu d’impact

  • Sous Modibo Keïta (1960-1968), la priorité était de rompre avec l’héritage colonial et d’introduire les langues nationales à l’école.
  • Sous les régimes militaires et la dictature, l’école a stagné, avec un taux de scolarisation plafonnant à 20 %.
  • Après la révolution de 1991, la démocratisation politique a entraîné la réforme de la Nouvelle École Fondamentale (NEF) en 1994, puis le Programme Décennal de l’Éducation (PRODEC) à partir de 2000. Ces politiques ont permis d’ouvrir massivement l’école, mais sans résoudre les problèmes structurels : manque de moyens, inégalités régionales, abandon scolaire élevé (24,8 % en 2000, dont 30,6 % pour les filles).

 

Programmes inadaptés et employabilité en crise

Les réformes successives ont introduit de nouveaux programmes, souvent inspirés des modèles occidentaux (système LMD : licence, master, doctorat), sans réelle adaptation au contexte malien ni réflexion sur les besoins du marché de l’emploi. Les filières de formation se sont multipliées, mais sans débouchés réels. Aujourd’hui, le Mali compte plus de 4 millions de chômeurs diplômés, preuve criante de l’inadéquation entre l’école et le monde du travail3.

« Le système éducatif malien serait en fausse note avec le marché de l’emploi. Un grand fossé sépare l’étudiant malien d’un futur travail après ses années de bancs. »

Les entreprises maliennes déplorent le manque de compétences pratiques chez les jeunes diplômés, qui sortent de l’université sans expérience professionnelle ni savoir-faire adapté3. Les coûts élevés des études supérieures aggravent encore la situation : un master peut coûter jusqu’à 1,5 million de francs CFA par an, bien plus cher qu’en France, ce qui exclut de nombreux jeunes des cycles avancés.

 

L’école malienne à la croisée des chemins

Face à cette crise, l’école malienne doit choisir entre poursuivre la course aux chiffres – diplômes délivrés, taux de scolarisation – ou engager une véritable révolution qualitative. Les experts et les acteurs du secteur plaident pour :

  • Un recentrage sur la formation des enseignants
  • Une adaptation des programmes aux réalités économiques locales
  • Un investissement massif dans les infrastructures et les outils pédagogiques
  • Un meilleur accompagnement vers l’emploi, avec des stages et des filières professionnalisantes

 

Sans ce sursaut, l’école malienne risque de continuer à produire des diplômes… et des chômeurs.

 

MARAMORY BOUKA NIARE
Rédacteur en Chef
RPMEDIAS

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