Au Mali, on aime les débats. Mais attention, pas n’importe lesquels. Pas les débats sur l’éducation, l’économie ou l’avenir du pays, non ! Ça, c’est pour les pays qui n’ont pas de grin sur les réseaux sociaux.
Nous, on préfère les discussions de haute volée intellectuelle comme : « Entre ta femme et ta mère, qui choisis-tu ? ».
Depuis quelques jours, ce débat fait tourner les moulins à parole du grin, engorge les certains plateaux télé, et surtout remplit les stories. On dirait même que certains dorment avec cette question sous l’oreiller.
Le faux dilemme qui infantilise l’homme malien
Sociologiquement, cette histoire est déjà bancale. Dans notre culture, la mère et l’épouse ne sont pas censées se battre pour un titre de « Reine du foyer ». L’une est la fondatrice, l’autre est la co-pilote.
Mais dans nos débats, l’homme devient un enfant éternel qu’on force à choisir entre sa couche culotte d’hier et sa couette conjugale d’aujourd’hui.
À ce rythme, bientôt on va demander :
- « Entre ton tailleur et ton couturier, qui choisis-tu ? »
- « Entre ton téléphone et ta carte SIM, qui choisis-tu ? »
Non mais sérieusement…
La culture malienne mal interprétée
Traditionnellement, le mariage unit deux familles. Maman et madame ne sont pas censées être rivales. Elles sont censées… s’entendre (ou au moins se tolérer autour du Tô). Mais les certains maliens ont transformé ça en combat UFC : « Belle-mère vs Belle-fille : Round 1 ». Avec des arbitres auto-proclamés : influenceurs, pseudo-coachs et grinologues certifiés par Tiktok University.
Et si on posait la question aux femmes ?
Parce que bizarrement, c’est toujours aux hommes qu’on demande de choisir. Jamais aux femmes. Imaginez qu’on pose à une sœur : « Entre ton mari et ton père, qui choisis-tu ? » Réponse probable : « Toi aussi, va t’asseoir, tu veux me chercher des problèmes familiaux ? »
Pourquoi ce débat est une perte de temps
- Il n’a aucune application réelle : dans la vraie vie, personne ne vous met devant un tribunal pour couper les liens avec l’un ou l’autre.
- Il occupe un espace médiatique qui pourrait servir à parler de chômage, d’éducation ou de santé… mais ça, c’est moins croustillant.
- Il maintient l’homme dans un rôle de « bébé adulte » qui ne sait pas gérer ses relations.
Au final, ce débat, c’est comme demander à un pêcheur de choisir entre son filet et sa pirogue. Ça n’a pas de sens. La prochaine fois qu’on vous pose la question, dites juste :
« Je choisis de ne pas participer à ton concours de bêtise nationale. Maintenant, on parle du vrai développement du pays ? »
Parce qu’entre nous, tant que le Mali passera plus de temps à arbitrer des faux combats qu’à planifier son avenir, on aura toujours un retard d’avance dans le classement des débats inutiles.
Maramory Bouka Niaré
Rédacteur en chef
